La salade aigre du printemps
Cette semaine on paye nos hommages à Marine Normand et on parle d’aigreur, un trait de caractère peu enviable alors que sa saveur est recherchée dans certains aliments.
J’ai beaucoup ri en écoutant le nouvel épisode du podcast Emotions consacré à l’aigreur. Il est écrit par
Normand, l’autrice (entre autres) de la newsletter . Pourquoi ce nom ? Parce que Marine est aigre comme un cornichon et qu’elle aimerait redevenir concombre, plus fraiche et repulpée.On est rarement ravi•e d’être qualifié•e de personne aigrie, c’est une émotion qui appartient à celles et ceux qui échouent. Ce qui nous rend aigre c’est un environnement qui ne nous donne pas ce que l’on veut, des évènements qui nous malmènent. En cuisine c’est différent, vous ne me demanderez pas de vous servir un verre si je vous dis que ce vin est aigre, mais il est possible que vous me tendiez volontiers votre assiette si je vous propose des crevettes aigre-douces ou un peu de crème aigre pour accompagner vos chips. Puis vous prendrez bien un yaourt, une tranche de pain au levain ou un peu de choucroute ?
Dans l’alimentation, l’aigreur peut être une bonne ou une mauvaise chose. L’aigreur, c’est le fruit de la fermentation et comme l’émotion, elle est provoquée par ce qui environne l’aliment : l’air, l’eau, le sel et les bactéries. La fermentation donne des saveurs en bouche agréables ou détestables, dans un cas comme dans l’autre, son goût nous protège. L’aigreur est mauvaise ? Elle vous empêche de consommer un aliment qui a tourné et qui pourrait vous rendre malade. Elle est agréable ? La fermentation a crée un produit bon pour votre digestion (et l’environnement) et l’aliment lui même a atteint un stade où sa conservation est stabilisée.
Peut-être que l’on peut porter le même regard sur l’aigreur de l’âme, ni bonne ou mauvaise en soi mais assurément utile pour nous donner des informations sur notre état. Puis être insatisfait•e ça fait bouger les choses, et être aigri•e, c’est bien connu, ça conserve.
Dans la salade du jour, nous allons chercher la bonne aigreur, celle du lait fermenté (que l’on appelle aussi entre autres lait ribot ou kefir) et des cornichons aigres-doux appelés malossols.
Marine, si tu lis cette lettre, peut-être qu’avant de devenir concombre, tu peux aspirer à être un cornichon aigre-doux, une tranche de malossol comme on en trouve lovée dans les hamburgers, l’heureuse surprise qui se niche dans la bouchée centrale. Attention tout de même à ne pas devenir un cornichon au sel, de mon point de vue c’est vachement moins agréable en bouche. Je m’adresse maintenant à celles et ceux qui souhaitent réaliser la recette : attention à bien choisir des cornichons à la russe (aigre-doux) et non à la polonaise (au sel).
Pour parfaire le caractère de cette salade, nous y ajouterons aussi les notes sulfurées de l’ail, du chou rouge et l’oignon, et un peu de piquant imprévisible avec quelques radis. Enfin, puisque j’ai du aller dans l’épicerie arménienne de mon quartier pour acheter des cornichons, nous y ajouterons aussi des chips de pain lavash au zaatar. Le lavash c’est un très grand pain, très fin, qui a été cuit dans un four tandoor. Il est super pour confectionner des sandwichs ou pour tremper dans des condiments à l’apéritif ! Si vous n’en trouvez pas, vous pouvez utiliser de la pita libanaise à la place.
Outre les pérégrinations de Marine au monde l’aigreur, l’idée de faire cette salade fraiche assaisonnée avec du lait fermenté m’est venue en lisant la recette de salade fattouche de sa mère que Sami Tamimi livre dans la bible culinaire Jérusalem. J’ai hâte de pouvoir en cuisiner une version estivale avec quelques tomates cet été.
La recette pour une bonne salade à partager
20 minutes • végétarienne • hivernale et printanière
Ingrédients
Un peu de salade type feuille de chêne
Un peu de chou rouge
Quelques radis roses
Un petit oignon rouge
3 cornichons malossols
Un demi-pain lavash
De l’huile d’olive
Quelques cuillères à soupe de zaatar
Une gousse d’ail
Pour la sauce :
Un verre de lait fermenté
2 cuillères à soupe du jus des malossols
Une cuillère à café de miel
2 cuillères à soupe de mélasse de grenade
a. Préchauffez votre four à 200°c. Disposez le demi-pain lavash sur votre plan de travail et frottez-le avec une gousse d’ail coupée en deux. Arrosez-le d’un filet d’huile d’olive avant de le recouvrir d’un peu de zaatar.
b. Roulez le pain et découpez-le en fine tranches pour en faire des tagliatelles. Disposez-les sur une plaque de four chemisée de papier sulfurisé. Vous pouvez défaire les rouleaux et en laisser quelques un enroulés. Couvrez l’ensemble d’un filet d’huile d’olive et enfournez pour 8 à 10 minutes. Surveillez régulièrement le four, le pain est très fin et peu hydraté, il peut colorer rapidement.
c. Placez la salade et tous les légumes finement émincés dans un saladier.
d. Hachez très finement l’ail qui a servi a frotter le pays et placez-le dans un bol avec tous les autres ingrédients de la sauce. Mélangez bien et ajoutez un peu plus de ceci ou de cela pour que l’aigreur soit à votre goût. L’eau des cornichons étant déjà salée, il n’est en général pas nécessaire d’en ajouter.
e. Ajoutez la sauce à la salade et parsemez les assiettes des chips de lavash, c’est prêt !
Ps : Marine, en cherchant dans Le répertoire des saveurs de Niki Segnit où se trouvait l’aigreur, j’ai vu que les choses étaient plutôt bien rangées. En plus tu règnes sur le caviar et les huitres, voyez-vous ça.
quelle newsletter !! poétique et gourmande, un brin philosophique <3
Je suis ravie de savoir que je règne sur le monde poissonnier. Merci pour le clin d'oeil Lola <3 et je teste la recette CE WEEKEND.