La marak kubbeh adom (en deux versions)
Comment définissez-vous ce qu’est une boulette vous ? Vous êtes plutôt du genre libéral ou orthodoxe ?
Courant Septembre, j’ai découvert que s’organisait un concours de boulettes à l’occasion de la première édition du festival Saveurs et Savoirs à Uzès. Comment passer à côté ? Un concours de boulettes ça fait forcement appel à la cuisine du cœur, celle qui est généreuse et roborative.
La boulette c’est de la haute ingénierie qui peut se présenter sans fard. Une boulette est bonne parce que le mélange des saveurs se fait bien, parce qu’elle a en elle ce qu’il faut pour rester moelleuse à la cuisson tout en gardant sa forme. La boulette est maline parce qu’elle permet d’accommoder des ingrédients bon marché et sa composition peut varier en fonction des ingrédients qui peuplent notre réfrigérateur et les placards. Organiser un concours de boulettes c’est rendre hommage aux cuisines familiales et astucieuses du monde entier, quelle bonne idée.
J’ai proposé à la phase de sélection une marak kubbeh adom (traduction littérale : « soupe de boulette rouge »), une recette traditionnelle de la cuisine juive irakienne dont j’avais partagé une variation dans une lettre précédente. L’ingéniosité de ces boulettes, c’est d’enfermer la farce dans une enveloppe de pâte de semoule pour qu’elles puissent rester longtemps au chaud dans leur soupe sans dessécher la viande.
J’ai été sélectionnée pour la finale du concours (wou-ouh !) et donc invitée à cuisiner ces kubbe le week-end dernier à Uzès devant un jury d’expert•es mené par François-Régis Gaudry. Avant de déguster nos plats, il était important pour nos juges de fixer le cadre de la demande et de déterminer ce qui est ou n’est pas une boulette. Les plus orthodoxes considèrent que la boulette, pour être nommée comme telle, se doit d’être nue (sans crépine, coque, panure ou pâte) et de tenir sans artifice. Mince, si on s’en tient à cette définition la plus part des plats finalistes sont hors-sujet, le mien y compris. Forte heureusement le jury a décidé que cette fois tout met à peu près sphérique aurait le droit à la dénomination de boulette.
Dans la religion comme dans la cuisine, il semble donc que j’ai tendance au libéralisme. Cette appétence pour la liberté s’heurte aussi à l’envie d’être une bonne élève et de respecter les règles, alors la question m’a trottée dans la tête toute la semaine, elle aurait donnée quoi cette soupe aux boulettes dans sa version orthodoxe ? Et bien elle est pas mal, c’est un plaisir différent. Ça crée un plat qui serait très intéressant de servir avec de la semoule pour créer un couscous rose !
Cette semaine, je vous propose donc une recette et demi. Un bouillon pour deux courants de boulettes différents, à vous de choisir la voie que vous souhaitez emprunter, allez, en cuisine.
La recette pour une vingtaine de kubbe
3 heures • omnivore • estivale et automnale
Ingrédients
Pour la pâte :
330 g de semoule fine
200 g d’eau
Une cuillère à café de sel
Pour la farce :
2 oignons
250 g de viande de boeuf haché
4 clous de girofle
2 gousses de cardamome
Une cuillère à café de graines de coriandre
Une pincée de muscade moulue
Une pincée de sel
Un oeuf
De l’huile d’olive
Pour la soupe :
Un oignon jaune
Une branche de céleri
2 feuilles de laurier
3 gousses de cardamome
Une cuillère à café de graines de coriandre
3 tranches de gingembre frais
3 petites betteraves crues
Une cuillère à soupe de concentré de tomate (à prendre en bocal en verre pour éviter le goût ferreux de la boite de conserve)
Le jus d’un ou de 2 citrons et leurs zestes
Une cuillère à café de sucre
Une cuillère à café de sel
De l’huile d’olive
Préparer la pâte
a. Mélangez la semoule fine, le sel et l’eau et en pétrissez l’ensemble 5 minutes à la main.
b. Quand la pâte est homogène (mais pas forcement totalement lisse), laissez-la reposer – au moins 30 minutes, jusqu’à 4 heures si vous pouvez – sous un linge le temps de préparer le reste.
Préparer la farce
a. Pilez ensemble les clous de girofle, l’intérieur des gousses de cardamome et les graines de coriandre.
b. Emincez les oignons en petits dès. Faites chauffer une lampée généreuse d’huile d’olive dans une sauteuse pour les faire revenir avec les épices pilés et laissez cuire 10 à 15 minutes en remuant de temps en temps, jusqu’à que l’ensemble soit bien doré.
c. Ajoutez la viande hachée et faites-la revenir en la remuant fréquemment. Quand la viande est grillée, salez et ajoutez un verre d’eau dans votre sauteuse. Faites cuire jusqu’à évaporation complète de l’eau. (Cette étape permet de bien faire infuser les clous de girofle.)
d. Laissez refroidir la viande. Ajoutez un œuf, la muscade et mélangez bien. Réservez le temps de préparer la soupe.
Préparer la soupe
a. Emincez l’oignon en petits dès. Faites chauffer une lampée généreuse d’huile d’olive dans une cocotte pour le faire revenir jusqu’à ce qu’il dore, avec les graines de coriandre, de cardamome et les tranches de gingembre frais.
b. Taillez le céleri en petit dès, et ajoutez le aux oignons pour le faire revenir quelques minutes.
c. Découpez les betteraves en petits dès sur un support qui pourra être nettoyé facilement et ajoutez-les à la cocotte.
d. Ajoutez 1,5 litres d’eau et les feuilles de laurier et laissez cuire 30 à 35 minutes, le temps de façonner les kubbeh.
Préparer les kubbe
a. Reprenez la pâte et pétrissez-là de nouveau quelques minutes, cette fois jusqu’à ce qu’elle soit bien lisse.
b. Prélevez un morceau de pâte de la taille d’une petite balle de golf et roulez-la dans vos mains pour l’arrondir.
c. Aplatissez la pâte en disque, elle doit être épaisse d’environ 3 millimètres. (plus épaisse, elle aura du mal à cuire, plus fine, la boulette risque de se percer à la cuisson)
d. Placez une cuillère de farce au centre du disque de pâte et refermez le kubbe. Roulez-le délicatement entre vos mains pour l’arrondir, et déposez-le sur une planche ou une assiette parsemée de semoule pour éviter qu’il ne colle à la surface.
Cuire les boulettes
a. Ajoutez le concentré de tomate et le jus de citron dans le soupe avant d’y plonger délicatement les kubbeh. C’est le bon moment pour rectifier l’assaisonnement de la soupe, elle doit être bien acide et puissante pour contraster avec la douceur des boulettes.
b. Laissez cuire 35 minutes à feu moyen en remuant délicatement les boulettes de temps en temps. Servez bien chaud !
Version orthodoxe des boulettes
Faire cette version vous fera passer un peu moins de temps en cuisine, pensez à préparer les boulettes quand le bouillon a déjà commencé à cuire, vous en aurez besoin pour préparer la farce ! Et si vous souhaitez en savoir plus sur les bonnes pratiques pour faire de bonnes boulettes, vous pouvez relire cette lettre !
Pour la farce :
2 oignons
250 g de viande de boeuf haché
50 g de boulgour
4 clous de girofle
2 gousses de cardamome
Une cuillère à café de graines de coriandre
Une pincée de sel
Du poivre
Un oeuf
De l’huile d’olive
a. Pilez ensemble les clous de girofle, l’intérieur des gousses de cardamome et les graines de coriandre.
b. Emincez les oignons en petits dès. Faites chauffer un filet d’huile d’olive dans une sauteuse pour les faire revenir avec les épices pilés et laissez cuire 10 à 15 minutes en remuant de temps en temps, jusqu’à que l’ensemble soit bien doré. Débarrassez les oignons dans un bol et laissez-les refroidir.
c. Placez le boulgour dans un petit bol et mouillez-le de quelques louches du bouillon entrain de cuire pour le faire gonfler.
d. Dans un bol où vous pourrez mélanger la farce ou dans le bol d’un robot pâtissier, réunissez les oignons, la viande et le boulgour et commencez à mélanger l’ensemble, toujours dans le même sens.
e. Quand l’appareil commence à être homogène, ajoutez l’œuf et continuez à mélanger jusqu’à ce qu’il soit complètement incorporé.
f. Formez des boulettes de la taille que vous souhaitez et faites-les pocher dans le bouillon à feu doux. Pour des boulettes de la taille d’environ 3 centimètres, une cuisson de 12 à 15 minutes sera suffisante. Servez tant que c’est bien chaud !
Bon appétit et à très bientôt !
Ps : Le concours a été gagné par Chloé qui partage ses recettes sur son très beau site Kantine Magazine, bravo à elle !