La salade tomates, pastèque, feta
Vous avez chaud ? Moi aussi. Venez, cette semaine on prépare une salade très rafraichissante et en 5 minutes montre en main.
Quand je cherche un paquet de feta au supermarché, je pense toujours au fait qu’auparavant le paquet du fromage Salakis (produit en Aveyron par une filiale du groupe Lactalis) portait la mention « feta » et que depuis 2007, il est seulement noté « 100% lait de brebis ». Ce changement de dénomination sur le packaging qui pourrait semblait anecdotique est en réalité la marque de plusieurs défaites des pays de l’Europe du Nord face à la Grèce.
C’est une situation Nord/Sud tout à fait classique. Depuis des millénaires, on fabrique des fromages de brebis qu’on conserve dans de la saumure et ce dans de nombreuses régions méditerranéennes. Au cours du 20e siècle des industriels européens et du monde se mettent à en produire – surement parce que son procédé de fabrication est relativement rapide pour un fromage. Au Danemark, on développe même une industrie de fromage au lait de vache qu’on nomme feta !1
Premier volet de la bataille, en 1984, le Danemark tente de faire protéger le nom feta pour designer entre autres les fromages de vache qu’elle produit en saumure auprès de la Federation Internationale du Lait. Les pays du sud de l’Europe (France inclue) s’y opposent : la feta, c’est un fromage de brebis et de chèvre. La Fédération ne tranche pas la question, la renvoie à la FAO (L'Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture) qui ne se prononce pas non plus. Suite à ces évènements, la Grèce modifie son code des aliments et des boissons et détermine que la feta est un fromage de brebis, dont la proportion éventuelle de lait de chèvre ne peut pas excéder 30%. De ce fait, les fromages danois sont désormais interdits à l’importation sur leur territoire.
En 1994, suite à des libéralisations de marchés, le secteur de la feta grecque est en crise. Après une rapide montée des prix du lait, la demande baisse et éleveurs se retrouvent avec des stocks périssables sur les bras, c’est dans ce contexte que la Grèce demande à l’Union Européenne que la feta soit protégée par une Appellation d’origine controlée (un label que la France a poussé l’Europe a adopté) et que ce nom ne puisse désigner que des fromages produits sur son territoire. L’AOP est acceptée en 1996, mais la France, l’Allemagne et le Danemark montent au créneau pour défendre leurs marchés et l’appellation est révoquée en 1999. L’Europe tranche à nouveau en 2003, la Grèce a enfin gagné sa guerre, adieu Feta Salakis produite dans l’Aveyron, il faudra changer de nom.2
Est-ce que David a véritablement triomphé de Goliath dans cette histoire ? Pas vraiment. Lactalis a eu beau expliquer que cette décision allait causer du tord à sa filliale en Lozère et aux personnes qui vivent de la production de la feta Salakis, au final la fromagerie du Massegros a augmenté ses volumes de vente et de production.
Et maintenant en cuisine, promis, ça sera rapide. On a tous chaud, pas envie d’allumer le four ou une plaque de cuisson et il faut manger léger pour pouvoir prendre deux glaces au dessert. Alors, rassemblons tous les aliments les plus emblématiques de l’été, coupons-les et marions-les dans une salade.
La recette pour un grand bol
5 minutes • végétarienne • estivale
Ingrédients
500 g de pastèque
600 g de tomates (jaunes pour le contraste)
100 g de feta
Quelques feuilles de menthe
Quelques feuilles de basilic
Une pincée de sel
Un filet de vinaigre balsamique
Un filet d’huile d’olive
a. Découpez la pastèque et les tomates en morceaux légèrement irréguliers, émincez finement les herbes et placez-les dans le plat de service.
b. Coupez la feta en tranches et émiettez-la avec les doigts, la texture sera plus agréable ! Ajoutez-la au plat, terminez la salade en la salant légèrement, et en versant un filet de vinaigre et un filet d’huile d’olive, c’est prêt !
Et pour que cette préparation ressemble au fromage de brebis bien blanc, on y ajoute du « Bleu patenté V », le E131 qui colore le Get 27, et les Schtroumpfs (jusqu’en 2020), un colorant interdit aux Etats-Unis et simplement controlé dans l’UE, voyez-vous ça.
Pour creuser un peu plus le sujet, voici l’article d’Elia Petridou sur le site du Cairn qui m’a mené à vous raconter cette histoire.