Les maamouls au praliné
Saviez-vous qu’il existait un biscuit que l’on retrouve à la fois lors du Ramadan, de Pâques et de Pourim sur les tables des familles orientales ?
Bonjour à toutes et tous, il semblerait que vous soyez désormais plus de 1 500 à recevoir cette infolettre (quasi) hebdomadaire, j’en suis très heureuse et ça m’intimide un peu. Si vous ouvrez cette missive pour la première fois, bienvenue, installez-vous confortablement. Je vous ai préparé des petits gâteaux qui iront très bien avec une tasse de thé ou de café.
La recette du jour ne pourrait pas être plus de saison, il me semble avoir trouvé le seul gâteau qui se déguste à la fois lors des ftours du ramadam, des soirs de carême, de pâques et le jour de pourim. Et, fait très rare, cette année les calendriers grégorien, hégérien et hébraïque font coïncider les dates de toutes ces fêtes monothéistes. J’ai vérifié, de mon vivant ça n’est jamais arrivé, alors comment passer à côté de l’occasion de confectionner ces petits sablés fourrés que sont les maamouls ? La farce est traditionnellement composée de pâte de dattes, de pistaches ou de noix. Ici nous les fourrerons au praliné, certain•nes diront que ce sont des « néomaalmoul » mais peu importe le nom tant qu’on obtient de friands biscuits friables.
En préparant l’écriture de cette lettre, je me suis posée une question que je me pose systématiquement quand je fais mes recherches : « quelle est l’origine de cette recette ? ». Parfois les réponses que je trouve sont très précises et renvoient à une région ou une tradition spécifique, il arrive aussi que les origines ou la maternité de la recette soient disputées, ce qui n’est pas étonnant quand on sait que certains plats sont parfois brandis comme des emblèmes nationaux ou identitaires. La cuisine est politique, elle est utilisée par certain•es pour assoir leur supposé supériorité (voyez-voir cette lettre qui parlait de gastronationalisme) quand d’autres s’en servent pour réaffirmer leur existence et sensibiliser à leur culture, comme le fait en ce moment Sami Tamimi sur Instagram en partageant des recettes palestiniennes.
Dans le cas des maamouls, j’étais persuadée que j’allais me confronter à des querelles d’églises en cherchant à percer les secrets de ses origines. Etonnement, non. Il semble exister un consensus pour dire que cette recette appartient au monde moyen-oriental dans son ensemble. Voici ce qu’en dit l’historien Charles El-Hayek dans l’Orient-Le jour : « Ce que nous définissons aujourd’hui comme une nourriture traditionnelle n’a rien à voir avec ce que mangeaient nos ancêtres, car ils utilisaient des ingrédients différents. Les recettes sont historiques, bien sûr, mais elles n’appartiennent pas à un seul pays, parce qu’elles sont nées avant la carte actuelle du Moyen-Orient et parce que leurs ingrédients changent et continuent de changer. Le maamoul était à l’origine préparé avec de la samneh (ghee). À présent, nous utilisons du beurre à la place. La recette a été modifiée. »
Il ajoute aussi : « Aucun pays ne peut revendiquer une recette. Les recettes s’adressent à tout le monde, car les aliments voyagent. Son identité change, elle adopte de nouveaux ingrédients et en perd en chemin. Les recettes sont des choses vivantes. ». Je suis assez d’accord sur ce point, dans un monde idéal chaque personne devrait pouvoir adapter n’importe quelle recette selon ses goûts et ses envies. À nuancer tout de même : la cuisine est une partie sensible de nos identités et les adaptations de recettes sont parfois liées à des histoires qui n’ont pas encore été apaisées. C’est surement pour ça que des personnes d’Afrique du nord roulent des yeux à la vue d’un couscous royal, une invention culinaire liée au colonialisme.
J’ai écrit cette recette en écoutant le super album de Jonny Greenwood et Dudu Tassa, « Jarak Qaribak » (ce qui se traduit « votre voisin est votre ami »). Ce projet est sorti en juin 2023 et réunit des voix et des musicien•nes de l’intégralité du monde moyen-oriental. Je souris d’apprendre que Jonny Greenwood affirme que ce projet n’est pas politique. Bien sûr Johnny, d’ailleurs cette recette de gâteau qui transcende les frontières, les traditions et les religions ne l’est pas non plus. 🕊
La recette pour une trentaine de biscuits
2 heures • végétarienne • toute l’année
Ingrédients
180 g de farine
200 g de semoule fine
120 g de sucre glace
250 g de beurre salé
Pour le praliné :
200 g de noisettes
150 g de sucre semoule
50 g d’eau
Une pincée de sel
Préparation du praliné
a. Préchauffez votre four à 200°c. Placez les noisettes sur une feuille de papier sulfurisé et faites-les griller au four 5 à 10 minutes pour les torréfier et pour pouvoir retirer les peaux plus facilement.
b. Pour retirer les peaux des noisettes, placez-les dans un torchon, refermez-le comme un baluchon et faites-le rouler dans vos mains pendant une à deux minutes. Retirer la peau pour faire du praliné est optionnel, et s’il en reste un peu, ce n’est vraiment pas très grave. Replacez les noisettes sur le papier sulfurisé quand l’opération est terminée.
c. Préparez un caramel avec le sucre semoule, la pincée de sel et l’eau. Préparez-le à feu moyen et surveillez-le bien. Coupez le feu quand sa couleur commence tout juste à tirer sur le roux et versez-le immédiatement sur les noisettes grillées.
d. Quand le caramel et les noisettes sont totalement refroidis, découpez le tout en morceaux grossiers et placez-les dans le bol d’un robot mixeur. Mixez longuement en faisant des pauses régulières pour bien repartir l’appareil dans le robot, et travaillez-le jusqu’à obtenir une pâte onctueuse sans gros morceaux de caramel. Un peu de patience est nécessaire. Réservez le praliné au frais.
Préparation des maamouls
e. Mélangez au robot pâtissier ou à la main tous les ingrédients ensemble en veillant à bien couper le beurre en petits morceaux. Vous devez obtenir une pâte dense, sableuse mais avec laquelle vous pouvez former une belle boule.
f. Pour former les maalmouls, prélevez un morceau de pâte et rouler le en boule. La boule doit faire le taille d’un gros calot ou d’un petit boulard.
g. Avec votre doigt (si vous n’avez pas de longs ongles) ou un ustensile rond, formez une petite poche avec la boule et versez une cuillère à café de praliné dedans. Refermez délicatement la boule et formez-là à l’aide d’un moule. Retournez le moule, et récupérez delicatement le maamoul pour le poser sur une plaque chemisée de papier sulfurisé.
Note : ici j’utilise un moule traditionnel à mamoul en bois que j’ai préalablement huilé. Si vous n’en avez pas, vous pouvez former vos gateaux dans un moule à madeleine, avec un moule à tartelette individuelles, ou simplement les décorer en leur donnant des coups de fourchette sur le dos. Notez aussi qu’il vous faudra peut-être plusieurs essai pour trouver la bonne taille pour former vos biscuits et pour réussir à bien enfermer la farce sans qu’elle déborde, tenez-bon !
f. Quand tous les biscuits sont formés, préchauffez votre four à 170°c et enfournez-les pour 13 minutes. Sortez-les du four et attendez qu’ils aient totalement refroidi pour les retirer de leur plaque, c’est prêt !
Du praliné dans un maamoul?!?? Moi je dis génie! En tout cas, ça me donne trop envie de goûter!