Les gnocchis grillés au lard fumé, crème de chou-fleur
Ne dites rien à vos ami•es italien•nes, mais les gnocchis grillés c’est quand même pas mal.
J’avais envie de gnocchis grillés. Je me souviens de la pub Lustucru dans les années 2000 qui vendait sa grande nouveauté : les gnocchis à poêler. Il semblerait qu’avant cette ère, le gnocchi ne se consommait que poché. Pourtant, depuis cette « innovation » de l’agro-alimentaire, le petit coussin à la pomme de terre se cuit fréquemment autrement. Je n’ai jamais consommé de gnocchis Lustucru mais en revanche, je suis une grande fan de la poêlée de gnocchis à la tomate et à la mozzarella de Picard, et de nombreuses personnes sur internet ne jurent que par la recette des gnocchis au four d’Owi Owi Fouette-moi.
Pour répondre à mon envie et ayant un peu la flemme de faire des gnocchis maison, je me suis demandée si on avait besoin de payer plus cher des gnocchis dits « à poêler » au supermarché pour les manger croustillants. Cette vidéo de Food Checking qui aborde la question sous l’angle « Les gnocchis à poêler sont-ils vraiment des gnocchis ? » ne donne pas clairement la réponse mais à voir la recette maison et la liste des ingrédients des versions industrielles, il ne semble pas y avoir une grande différence entre les deux. De plus, si Owi Owi les passent au four, c’est que ça doit marcher.
Cette vidéo m’a aussi fait sourire parce qu’elle est un bon exemple de ce que l’on appelle le « gastronationalisme ». Le chef interrogé semble avoir une partie du cœur arrachée quand on lui apprend qu’en France on les mange parfois grillés. Son émotion m’a rappelé ce que l’on a nommé il y a dix ans sur Twitter le « carbonara gate ». À l’époque sur ce réseau, on se faisait principalement insulter pour motif d’ajout de crème dans la sauce des pâtes. Un article de Flonot au style quelques peu autoritaire qui avisait de s’en tenir à la véritable recette avait fait couler beaucoup de tweets (et produit pas mal d’harcèlement) à l’époque.
La cuisine italienne jouit souvent d’une image de gastronomie ancestrale, immuable et un peu supérieure aux autres malgré la simplicité des principaux ingrédients. Pourtant, l’historien de l’alimentation Alberto Grandi remet en cause ce narratif, au grand dam de l’extrême-droite italienne qui ne veut pas entendre que le tiramisu a vu le jour dans les années 80 et que les carbonara ont été servies pour la première fois à des GI en 1944 : « les Américains avaient du bacon fabuleux, de la très bonne crème, un peu de fromage et des jaunes d’œuf en poudre», se souvient le chef italien Renato Gualandi qui aurait crée la recette.
Evidemment, les italien•nes n’ont pas le monopole du gastronationalisme et ne sont pas les seul•es à imager leurs traditions plus ancestrales qu’elles ne le sont vraiment. Cette magnification de l’histoire est peut-être propre à toutes les diasporas qui font briller leurs cultures d’origines par leurs assiettes. Un peu comme ces knishs dont je vous parlais il y a quelques semaines et qui semblent plus populaires à New-York que dans la diaspora ashkénaze installée en France.
Bref, trêve de totalitarisme culinaire, cette semaine on fait griller des gnocchis sous-vide et on les marie avec du chou-fleur et du lard, un duo de saveurs iconique qui fait toujours du bien. Si vous souhaitez rendre cette recette végétarienne, faites revenir les gnocchis dans de l’huile avec un mélange d’épices fumées et ajoutez un peu de miso blanc dans la crème de chou-fleur pour lui donner plus d’umami !
La recette pour deux portions
30 minutes• omnivore • automnale et hivernale
Ingredients
380 g de gnocchis
Un quart de chou-fleur
5 tranches de poitrine de porc fumée (lard)
Un quart de noix de muscade rapée
3 gousses d’ail confites (ou une gousse fraîche)
Du poivre
Si besoin : un peu de beurre ou d’huile
Si besoin : du sel
a. Découpez grossièrement le chou-fleur (prenez les fleurettes et le pied) et 2 tranches de lard, placez-les dans une casserole et couvrez-la à hauteur d’eau. Faites cuire à petit bouillon pendant 20 minutes.
Note : si vous n’avez pas d’ail confit comme préparé dans la recette de la semaine dernière sous la main, jetez une gousse d’ail fraiche épluchée dans la casserole !
b. Egouttez partiellement le chou-fleur et le lard (conservez environ deux cuillères à soupe d’eau), placez-les dans le bol d’un blender, ajoutez du poivre, la muscade et mixez jusqu’à obtenir une crème lisse. Goutez et si besoin, ajoutez un peu de sel.
c. Découpez les trois tranches de lard fumé restantes en morceaux très fins, et écrasez trois gousses d’ail confit. Faites revenir le tout deux minutes dans une sauteuse à feu moyen.
d. Ajoutez les gnocchis dans la sauteuse pour les faire griller dans le gras rendu par le lard. S’il n’y a pas assez de matière grasse, ajoutez un peu de beurre ou d’huile d’olive. La cuisson devrait prendre 3 à 5 minutes, mélangez régulièrement et surveillez bien la coloration du lard.
e. Dressez la crème de chou-fleur dans les assiettes et ajoutez les gnocchis bien chauds et croustillants dessus, c’est prêt !
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